Le terminal céréalier du port d'Odessa, le 10 avril 2023 en Ukraine

Le terminal céréalier du port d'Odessa, le 10 avril 2023 en Ukraine

afp.com/Bo Amstrup

Le marché s’affole. Deux jours après l’expiration de l’accord sur les céréales ukrainiennes, les cours du blé, du maïs et des oléagineux ont flambé ce 19 juillet. Le prix du blé a clôturé à 253,75 euros la tonne sur Euronext, gagnant 8,2 % en seulement vingt-quatre heures. Le maïs, lui, a grimpé de 5,4 % pour s’établir juste sous la barre des 250 euros la tonne.

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Ces hausses drastiques interviennent alors que Moscou a refusé de reconduire l’accord sur les céréales ukrainiennes. Signé en juillet 2022 sous l’égide des Nations Unies et de la Turquie, cet accord permettait à Kiev de continuer à utiliser la mer Noire pour exporter des céréales, malgré la guerre. Le Kremlin a laissé le texte expirer ce 17 juillet à minuit. Pour y revenir, il exige la levée des sanctions occidentales sur ses produits agricoles et sa réintégration au système financier Swift.

Ukraine : forte hausse des prix du blé

Ukraine : forte hausse des prix du blé

© / afp.com/Olivia BUGAULT

Menaces de Moscou

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Quelques heures après cette annonce, les prix sont restés stables dans un premier temps. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé qu’il poursuivrait les exportations en mer Noire, et d’autres transports – ferroviaire, fluvial et routier – ont été développés. "Mais deux éléments ont changé la donne", explique à L’Express Arthur Portier, consultant Agritel, un cabinet de conseil spécialisé dans les marchés agricoles et agro-industriels. D’abord, Moscou a mené des attaques aériennes sur Odessa et Tchornomorsk, deux des trois ports ukrainiens concernés par l’accord. 60 000 tonnes de céréales ont été détruites selon Kiev. Ensuite, la Russie a mis en garde la communauté internationale, assurant qu’elle considérerait comme une cible militaire tout navire se dirigeant vers les ports ukrainiens.

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Conséquence : beaucoup d’assureurs se sont retirés de la zone, et les cours ont flambé. "Pour l’instant, nous ne sommes pas encore dans l’euphorie de l’an dernier", tempère Arthur Portier. Le prix du blé atteint 250 euros la tonne, loin du pic de 430 euros la tonne en mai 2022 avant la signature de l’accord. "Mais la hausse risque de se poursuivre à court terme, car ces événements créent une nouvelle incertitude sur le marché", prévient le consultant.

Incertitudes sur le marché

Faut-il pour autant redouter des pénuries de céréales, voire des épisodes de famine ? "Tout dépendra de la durée de la suspension de l’accord", estime Arthur Portier. Même si elles sont plus coûteuses, d’autres voies d’acheminement des céréales existent. Ensuite, l’Ukraine n’en est pas le seul fournisseur : elle était en 2021 le troisième exportateur mondial d’orge, le quatrième de maïs et le cinquième de blé. Les récoltes ayant été bonnes dans l’hémisphère nord, "il suffit de pouvoir les transporter", note le consultant. "Si on manquait de blé, ce serait plus difficile. Là, il faut juste qu’il soit exporté." En revanche, beaucoup de pays pourraient avoir des difficultés à supporter une augmentation des prix sur le long terme. Leurs finances ont déjà été affaiblies par la hausse brutale de l’an dernier.

Les exportations de céréales depuis l'Ukraine

Les exportations de céréales depuis l'Ukraine

© / afp.com/Jonathan WALTER, Anibal MAIZ CACERES

Depuis juillet 2022, l’accord sur les céréales a permis de faire sortir près de 33 millions de tonnes de grains des ports ukrainiens. Ces livraisons ont surtout bénéficié à la Chine, à l’Espagne et à la Turquie. De son côté, Vladimir Poutine a assuré ce 19 juillet qu’il était prêt à revenir à l’accord si ses demandes étaient réalisées "dans leur totalité". Il a accusé les Occidentaux de se servir de cette question comme outil de "chantage politique".

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