Deux semaines qui auraient pu s’avérer décisives
Le média américain précise que durant ces quatorze jours, «les autorités chinoises décrivaient encore publiquement l’épidémie comme une pneumonie virale "de cause inconnue" et n’avaient pas encore fermé le marché couvert de fruits de mer de Huanan», d’où pourraient avoir émergé les premiers cas. De nombreux spécialistes estiment que si la communauté médicale avait eu accès à ces données plus tôt, cela aurait permis de «déterminer [plus rapidement] le mode de propagation du Covid-19, de développer des défenses médicales et de commencer à mettre au point un éventuel vaccin».
Le Wall Street Journal ajoute néanmoins que ces nouvelles informations ne permettent pas de déterminer si le virus a émergé dû à une infection d’origine animale ou d’une fuite dans un laboratoire. Elles montrent néanmoins toute l’opacité entourant encore l’origine de la pandémie et renforcent les soupçons à l’encontre de Pékin, accusé de transmettre des données incomplètes ou erronées. Ces révélations «soulignent à quel point nous devons être prudents quant à l’exactitude des informations publiées par le gouvernement chinois», a déclaré Jesse Bloom, virologue au Fred Hutchinson Cancer Center de Seattle.
Le séquençage finalement effacé de la base de données
Le média américain n’est pas parvenu à obtenir de réaction de la part de Lili Ren, travaillant à l’Institut de biologie des pathogènes de Pékin, une structure faisant partie de l’Académie chinoise des sciences médicales, elle-même affiliée au gouvernement. Seul un porte-parole de l’ambassade chinois aux Etats-Unis s’est exprimé, affirmant laconiquement que «les politiques chinoises de lutte contre le covid sont fondées sur la science, efficaces et cohérentes avec les réalités nationales de la Chine. Elles peuvent résister à l’épreuve de l’histoire», rapporte encore le WSJ.
Une question reste donc en suspens: où est donc passé ce séquençage du virus s’il a bien été téléchargé sur GenBank? Les données fournies par la chercheuse chinoise n’ont effectivement jamais été rendues publiques. N’ayant pas reçu de détails techniques supplémentaires sur le séquençage, les NIH ont même effacé celui-ci le 16 janvier 2020, conformément à leur protocole. Ces nouvelles informations sur les premiers jours du covid ont pu être obtenues grâce aux républicains de la commission de l’énergie et du commerce de la Chambre des représentants, qui ont menacé d’assigner le HHS à comparaître. Le département, ainsi que les NIH, n’ont pour le moment pas tenu à expliquer pourquoi ils n’avaient pas dévoilé ces données plus tôt.
Avant la révélation de ces nouveaux documents, il était public que Lili Ren se penchait sur les causes de l’émergence du covid. Elle avait notamment publié avec d’autres chercheurs en mai 2020 dans le Chinese Medical Journal une étude décrivant le prélèvement d’échantillons sur cinq patients dans un hôpital de Wuhan, entre le 18 et le 29 décembre 2019. Le séquençage a révélé la présence d’un nouveau coronavirus «associé à une maladie respiratoire grave et mortelle chez l’homme», avaient précisé les scientifiques. Une information que les autorités chinoises se sont gardées de transmettre lors de leur rencontre avec des responsables de l’OMS le 3 janvier 2020. «Cette base de données montre qu’en fait, au moins à partir du 28 décembre 2019, les scientifiques chinois savaient que cette pneumonie était causée par un nouveau coronavirus», conclut Jesse Bloom.