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Société

Un chrétien sur sept est persécuté dans le monde : « Le martyre n’est pas qu’une histoire du passé »

Les chrétiens sont les fidèles les plus persécutés dans le monde, avec une tendance à la hausse ces dernières années.

Charlotte d'Ornellas
22 mai 2018, dans le centre-nord du Nigeria, funérailles de dix-sept fidèles et de deux prêtres catholiques, assassinés par des nomades musulmans.
22 mai 2018, dans le centre-nord du Nigeria, funérailles de dix-sept fidèles et de deux prêtres catholiques, assassinés par des nomades musulmans. © EMMY IBU/AFP

Chaque année depuis 1993, l’ONG protestante Portes ouvertes réalise un index de la persécution dans le monde et la réalité est sans appel : les chrétiens sont les plus persécutés au monde ; pire sans doute, cette persécution s’aggrave et s’étend. Le nombre de pays concernés était de 40 en 1993, date de la première publication. En 2023, il est de 76. Le 22 novembre dernier, Montmartre était rouge…

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Comme chaque année, l’association Aide à l’Église en détresse illuminait plusieurs bâtiments mythiques dans le monde pour sensibiliser au martyre silencieux de ces chrétiens. Son président, Benoît de Blanpré, fait la même analyse que l’ONG protestante : « Les ennemis de l’Église sont nombreux et de plus en plus virulents. Nous identifions trois menaces majeures : l’islamisme, les pouvoirs autoritaires et les nationalismes ethnoreligieux qui relèguent au rang de citoyens de seconde zone toute minorité. » 

Ces deux associations, présentes partout dans le monde, s’entendent sur un chiffre : un chrétien sur sept ne peut vivre sereinement. Benoît de Blanpré insiste : « Beaucoup de chrétiens vivent leur foi au prix de leur vie, ou au prix d’humiliations et de discriminations quotidiennes. Le martyre n’est pas qu’une histoire du passé, c’est l’actualité de l’Église. » Impossible de faire une liste exhaustive du calvaire de ces chrétiens à travers le monde, mais des tendances se dessinent très clairement. Dans un Orient compliqué, en proie à des guerres permanentes et menacé par un islamisme vigoureux, les chrétiens se battent, espèrent, comptent sur de nombreuses associations – notamment françaises – pour tenir mais certains meurent, perdent tout, ou choisissent l’exil… Un exode qui ajoute au déracinement douloureux des familles l’effacement d’une histoire particulièrement dense et significative pour le christianisme.

185 chrétiens ont été tués, en mai,

dans le nord-est de l’Inde

Mais en 2023, la situation s’est aussi considérablement aggravée en Afrique, dans une indifférence quasi générale, en raison de la prolifération de groupes armés majoritairement djihadistes. Ce sont des attaques de villages, des blocus instaurés au Burkina Faso, au Mali ou au Nigeria, qui isolent, appauvrissent ou affament des populations entières. Par exemple, le sang coule au Nigeria chaque jour, et Portes ouvertes offre un recensement terrifiant : quinze morts par jour, vingt-trois prêtres, religieuses ou séminaristes enlevés dans l’année, certains assassinés, des milliers d’enlèvements, le tout à l’ombre d’une discrimination légalisée puisque certains États du nord du pays sont régis par une lecture particulièrement radicale de la charia.

En Asie, plusieurs facettes de ces persécutions cohabitent… On trouve les lois anti-conversion et anti-blasphème qui menacent quiconque ne professe pas la religion officielle du pays, souvent islamique : une accusation, et la persécution est immédiate. En août dernier par exemple, une quinzaine d’églises ont été attaquées et des centaines de maisons de chrétiens détruites dans un quartier ciblé par des islamistes, au Pakistan. Pour se justifier, ils hurlaient au blasphème…  Ces tensions sont exacerbées à la moindre occasion, et des attaques récurrentes endeuillent ou affaiblissent les chrétiens en Inde, au Pakistan, au Bangladesh ou en Indonésie… Sans compter la Chine ou la Corée du Nord, régimes totalitaires qui imposent un contrôle total – et des persécutions parfois physiques – à toute minorité religieuse.Dans le nord-est de l’Inde, les affrontements sont parfois sanglants : en mai dernier, 185 chrétiens sont morts et des dizaines de milliers de personnes ont dû quitter leurs villages, poursuivies par une ethnie hindoue. Résultat ? 100 000 catholiques chassés, plus de 300 églises brûlées. Pas un mot du gouvernement indien qui se fait lui-même l’instrument actif de discriminations graves envers ses propres minorités.

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Dans le sous-continent américain, pourtant massivement chrétien, les persécutions prennent des formes différentes : discriminations étatiques au Venezuela, contrôles de la pratique religieuse à Cuba, véritables persécutions au Nicaragua. Et même ailleurs sur le continent, ce sont les violences du narcotrafic qui ciblent les chrétiens, qui continuent à s’opposer à leur domination au Mexique – ou plus de 70 prêtres ont été tués ces trente dernières années – ou en Colombie.

DEGRÉS DE PERSÉCUTION DES CHRÉTIENS DANS LE MONDE AVEC QUATRE NIVEAUX D’INTENSITÉ
DEGRÉS DE PERSÉCUTION DES CHRÉTIENS DANS LE MONDE AVEC QUATRE NIVEAUX D’INTENSITÉ © ONG PORTES OUVERTES

Impossible de ne pas citer la Terre sainte cette année (lire page 2). Ou encore  l’Arménie, qui a vu plus de 100 000 chrétiens être chassés de leurs terres après neuf mois d’un blocus drastique imposé par l’Azerbaïdjan voisin. Il y a aussi ces pays musulmans dans lesquels la persécution n’est pas forcément sanglante mais particulièrement discriminatoire : les chrétiens, pourtant autochtones, n’ont pas du tout les mêmes droits que les autres citoyens. Et même au cœur de l’Europe, bien qu’incomparable, cette persécution se dessine jusqu’en France : des églises profanées, des chrétiens visés, parfois même assassinés par les mêmes djihadistes qu’ailleurs.Au matin de la nuit de Noël, Benoît de Blanpré évoque ces chrétiens qui fêteront Noël quand même, parfois la peur au ventre : « Je pense forcément à la situation en Terre sainte. Pris au milieu d’un conflit qui les dépasse, les chrétiens vivent dans l’insécurité et la peur de l’avenir. Je pense aussi aux chrétiens du Haut-Karabagh, chassés de leurs terres “comme des chiens” par l’armée d’Azerbaïdjan. Ou au Burkina Faso où Monseigneur Dabiré, évêque au nord du pays, ne fait même plus sonner les cloches des églises de son diocèse pour ne pas attirer l’attention des terroristes… »

Le message de ce petit enfant venu sauver le monde, cœur du message d’espérance transmis depuis 2000 ans par l’Église, garde forcément une place de choix dans la liturgie sauvegardée par tous ces fidèles courageux. Persécutés ou non, 2,2 milliards de chrétiens fêteront Noël cette nuit, à travers le monde. 

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